L’Homère des insectes : Jean Henri Fabre (1823-1915)

Talent immense déployé dans l’observation et la description du minuscule, esprit visionnaire tout entier concentré dans l’œilleton de la loupe, savant admiré se contentant de son chapeau de feutre et de son jardin provençal : faisons connaissance avec Jean Henri Fabre, écrivain et entomologiste (spécialiste des insectes), dont la plume rigoureuse et libre, vivante et poétique, ravira petits et grands lecteurs amoureux des sciences et de la nature. 

SON ŒUVRE : une centaine de manuels scolaires et d’ouvrages de vulgarisation, ainsi que dix tomes de Souvenirs entomologiques, traduits dans une quinzaine de langues !

Si j’écris pour les savants, pour les philosophes qui tenteront un jour de débrouiller un peu l’ardu problème de l’instinct, j’écris aussi, j’écris surtout pour les jeunes, à qui je désire faire aimer cette histoire naturelle. (Souvenirs entomologiques)

 

J.-H. Fabre en famille. Archives iconographiques Palais du Roure - Avignon

À l’ombre du monde

Surnommé « l’Homère des insectes » par Victor Hugo, « l’observateur inimitable » par Charles Darwin, « la mouche » par ses collègues professeurs qui le jugeaient insaisissable, homme modeste et scientifique autodidacte, Jean Henri Fabre força en son temps l’admiration des hommes de sciences comme des hommes de lettres.

Edmond Rostand, contemporain admiratif, résume en quelques vers l’humilité de son existence et de son écriture :

Pensif, — car dans ses doigts il a tenu des ailes, —
Poursuivant les honneurs moins que les sauterelles,
— Les sommets rêvent-ils d’être des sommités ? —

[…] Voilà sa vie. Elle est simple, triste, ravie.
Il n’enlève jamais son chapeau de berger.
Et ses livres se font tout seuls, avec sa vie.

(Fabre-des-insectes, 1922, extraits)

Une vie toute simple donc, faite de lectures, de dessins, de transmission, et surtout d’observation. Chasseurs impitoyables, tisserands agiles, maçons, terrassiers, architectes persévérants, croque-morts : à travers la loupe savante et amusée de Jean Henri Fabre, inlassable scrutateur, les insectes se révèlent des personnages dignes des meilleurs romans d’aventure !

collections Jean Henri Fabre, L'Harmas

Les collections exceptionnelles de Jean Henri Fabre sont conservées à l’Harmas. ©MNHN_P.Abel

Un savant, un professeur, un passionné de nature

Jean Henri Fabre passe ses premières années à Saint-Léons, le petit village d’Aveyron où il est né. Déjà, il se montre très curieux de petites bêtes, se plaisant à les observer et à les dessiner. Après quelques années difficiles marquées par des déménagements successifs de la famille, le jeune homme obtient une bourse qui lui permet de poursuivre ses études et de devenir instituteur. Jean Henri Fabre met à profit ces premières années d’enseignement pour approfondir ses connaissances de naturaliste auprès de botanistes (spécialiste des plantes) et d’entomologistes (spécialistes des insectes). Ses premières recherches ne lui apportent pas la richesse mais lui permettent de devenir un savant réputé. En 1862, le ministre de l’Instruction nationale lui confie la charge de préparer des cours du soir pour les adultes, qui remportent un vif succès.

Jean Henri Fabre se met alors à écrire des manuels scolaires. Ses explications sont claires, son style élégant et simple, ses histoires passionnantes. On lui commande plus de 70 ouvrages scolaires dans toutes les matières, que le savant écrit avec bonheur, tout en poursuivant ses recherches sur les insectes. En 1879, il s’installe à l’Harmas, une maison avec un jardin en friche qui lui semble un paradis pour ses études. Il y passe la fin de sa vie, entièrement consacrée à l’entomologie et à la transmission de son savoir par les livres.

L’Harmas de Jean-Henri Fabre : la propriété du naturaliste abrite le mas crépi de rose aux volets verts, entouré du jardin. ©A.Iatzoura MNHN

Transmettre le savoir

La  Science de l’oncle Paul, dont sont extraits les TétrasLire Insectes et Watt, est un manuel de lecture destiné aux enfants du primaire. L’oncle Paul est un homme doux et cultivé, un paysan passionné de livres, qui partage son temps entre les travaux des champs et la lecture. Ses neveux et nièces l’aiment beaucoup, et sont prêts à abandonner leurs jeux pour écouter ses histoires. Oncle Paul leur parle des animaux, du climat, de l’électricité, il leur fait comprendre par des exemples bien choisis les règles mathématiques, les lois de la physique. Bien entendu, oncle Paul ressemble comme deux gouttes d’eau à Jean Henri Fabre. Sa méthode est simple : d’abord on observe, ensuite on émet une hypothèse pour expliquer ce qu’on a observé, enfin on vérifie par une expérience si l’hypothèse est juste. C’est le fondement de la méthode scientifique, qui permet de bien réfléchir.

 

Si sa notoriété en France s’est largement émoussée au fil des années, Jean Henri Fabre est plus connu au Japon que Zola ou Stendhal. Ses Souvenirs entomologiques sont, pour beaucoup de Japonais, le premier contact avec la littérature française. Dans ces écrits mêlant rigueur scientifique et poésie, les Japonais retrouvent des traits constitutifs de leur culture et de leurs croyances :  le lien privilégié avec le monde, le respect de tout être vivant, du plus vieil arbre au plus petit insecte.

Les écrits de Jean Henri Fabre créent au Japon des accords subtils avec les estampes traditionnelles, bruissantes d’antennes et d’élytres, et avec les haikus chantant le monde de l’infime.

Fourmi !
Tu as beau grimper à la rose
Le soleil est encore loin

Au pays des Lucioles et des cigales, Jean Henri Fabre est comme chez lui. Clin d’œil malicieux de la postérité à l’homme de l’Harmas, dont l’univers tenait tout entier dans un petit domaine en friche aux confins du Vaucluse.

Pour en savoir plus ou visiter l’Harmas Jean Henri Fabre à Sérignan du Comtat (84) : www.harmasjeanhenrifabre.fr 

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